Conversion, résolutions, confession
Psychologie de la mystique

Sidérés par l’ampleur de l’épidémie qui nous frappe à l’improviste, nous sommes poussés, si nous croyons en Dieu, à mettre en lui notre confiance. Mais sa providence nous protégera-t-elle ? Que pouvons-nous attendre d’elle ? Comment nous y abandonner ? Pour éclairer notre réflexion sur ces questions vitales, voici quelques extraits d’un article sur la providence, suivis d’un lien vers l’article complet et d’un bref enseignement de saint François de Sales sur la façon de vivre la confiance en Dieu.

« L’épreuve de la providence. Plan infaillible ou liberté qui se risque ? » (extraits)

[… p. 269 :] Alors que beaucoup de chrétiens discernent l’action de la providence dans l’évitement des épreuves, il faut la situer dans la conformation au Christ traversant par amour la grande épreuve de sa passion. Cela est exprimé par Paul en ce sommet de l’évocation biblique de la providence : « nous savons qu’avec ceux qui l’aiment, Dieu collabore en tout pour leur bien, avec ceux qu’il a appelés selon son dessein. Car ceux que d’avance il a discernés, il les a aussi prédestinés à être conformés à l’image de son Fils, afin qu’il soit l’aîné d’une multitude de frères […] Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Lui qui n’a pas épargné son propre Fils mais l’a livré pour nous tous, comment avec lui ne nous accordera-t-il pas toute faveur ? » (Rm 8, 28-32). La providence, écrit Olivier Boulnois en référence à ce même passage, « ne mène à rien d’autre qu’au Christ, et ne permet pas de suivre d’autre voie que lui. En promettant aux hommes le bien, Dieu ne leur épargne pas les maux ».  

[… p. 271 :] Lorsque l’épreuve survient, Dieu désire que nous la vivions comme occasion d’une plus profonde conformation au Christ, dans la confiance qu’« avec ceux qui l’aiment, Dieu collabore en tout pour leur bien » (Rm 8, 28). C’est en ce sens que Dieu est dit éprouver « nos cœurs » (1 Th 2, 4) : non parce qu’il provoquerait les événements qui nous accablent (un viol, un tremblement de terre ou la mort d’un enfant ne sont pas des épreuves « envoyées par Dieu »), mais parce que de toute épreuve, il peut faire l’occasion d’un progrès dans l’union à lui : « Heureux homme, celui qui supporte l’épreuve ! Sa valeur une fois reconnue, il recevra la couronne de vie que le Seigneur a promise à ceux qui l’aiment. Que nul, s’il est éprouvé, ne dise : “C’est Dieu qui m’éprouve.” » (Jc 1, 12-13 ; voir 1 P 1, 6-7). S’abandonner à sa providence, c’est s’unir à son désir de nous conduire, à travers l’épreuve, à la pleine conformation au Christ, en laquelle consiste la joie en plénitude, et accepter que tel en soit le chemin. […] De ce point de vue, plutôt que de déclarer providentiels certains événements à l’exception des autres, il me paraît plus juste de ne déclarer providentielle que l’action de Dieu (son désir agissant) en notre faveur, quels que soient les événements. À notre regard faible et obscurci, ceux-ci ne peuvent être reconnus en toute certitude comme providentiels que dans la mesure où, à l’occasion de leur survenue, nous nous abandonnons davantage à la providence, c’est-à-dire au désir agissant qu’a Dieu de nous unir à lui par la conformation au Christ.

[…p. 272 :] L’abandon de chacun à la providence est lui-même une médiation de la providence pour autrui. Comme le dit très justement Olivier Boulnois, « la Providence s’accomplit dans la liberté humaine. Elle donne à chaque homme la responsabilité infinie d’être l’instrument de la bienfaisance divine à l’égard d’autrui » ; elle « nous oblige envers autrui à proportion de ce qu’elle promet pour nous ». Dans la mesure même où elle nous conforme au Christ, elle nous donne la possibilité d’aimer comme il nous aime, et d’être ainsi médiateurs de la providence. La conformation au Christ conduit à avoir les mêmes « dispositions » que lui (Ph 2, 5), à aimer (1 Jn 4, 7-13) jusqu’au don de sa propre vie (1 Jn 3, 16). Dans une poignante méditation du chemin de croix vécu par son frère jumeau détruit par le cancer, Karl-Heinz Menke a exprimé cela en ces termes : « La force de Dieu vient toujours — toujours ! — par la médiation d’êtres humains ; tout d’abord par l’homme Jésus ; mais aussi par tous ceux en qui Jésus est concrètement présent. Chacun de nous est dans ce monde comme une ouverture (Pore) pour l’entrée du Dieu qui est devenu concret dans le Christ. Nous sommes les ouvertures qui peuvent s’ouvrir ou se fermer pour son « entrée ». Il ne nous contraint pas. Mais quand nous le « laissons entrer », nous devenons grâce les uns pour les autres. »

En conformant notre désir et notre action au désir agissant de Dieu qu’est sa providence, nous en devenons médiation pour autrui.

Ces réflexions sont extraites de J.-B. Lecuit, « L’épreuve de la providence. Plan infaillible ou liberté qui se risque ? », Recherches de Science Religieuse, 105/2 (2018) 255-274, où l’on trouvera la référence des textes cités. Il y est notamment montré que la providence est Le désir de Dieu pour l’homme. Certains passages ne sont pas de lecture aisée : les pages les plus accessibles se trouvent dans la dernière partie, « Liberté et providence dans l’épreuve », à partir de la page 270.

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Cet article a fait l’objet d’un approfondissement ultérieur, présenté ici »

 

La pratique de la confiance en Dieu selon saint François de Sales : 

Mais vous dites que vous ne sentez point cette confiance. Quand vous ne sentez pas, il en faut faire un acte et dire à Notre-Seigneur : Encore que je n’aie aucun sentiment de confiance en vous, je sais pourtant que vous êtes mon Dieu, que je suis tout[e] vôtre, et n’ai espérance qu’en votre bonté ; ainsi je m’abandonne tout[e] en vos saintes mains. Il est toujours en notre pouvoir de faire de ces actes, et quoique nous y ayons de la difficulté, il n’y a pourtant pas de l’impossibilité ; et c’est en ces occasions-là, parmi les difficultés, où nous devons témoigner de la fidélité à Notre-Seigneur ; car bien que nous les fassions sans goût ni aucune satisfaction il ne s’en faut pas mettre en peine, puisque Notre-Seigneur les aime mieux ainsi. Et ne dites pas : Je les dis vraiment, mais ce n’est que de bouche ; car si le cœur ne le voulait, la bouche n’en dirait pas un mot. Ayant fait cela demeurez en paix, et sans faire attention sur votre trouble, parlez à Notre-Seigneur d’autre chose (Entretiens spirituels, III, dans Œuvres, « Bibliothèque de la Pléiade », Gallimard, 1969, p. 1022 s.).

Sur le caractère illusoire de la croyance en la providence selon Freud :

voir « La providence, illusion ou réalité ? » (article de ce site, avec des extraits de L’avenir d’une illusion, de Freud)

 

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