« Soigner l’esprit »
Psychanalyse et mort de Dieu, par J.-D. Causse

Dans un passionnant article désormais disponible en ligne, le grand théologien moraliste Xavier Thévenot propose une lecture psychanalytique et théologique très intéressante des récits bibliques de la création et de la chute, et du récit évangélique des pèlerins d’Emmaüs.

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Résumé et extraits :

Résumé

Cet article tente de souligner que le récit d’Emmaüs a une structure exactement inverse de celle du récit du péché originel. La rencontre du Ressuscité peut donc être considérée comme un acte de re-création, ce qui n’est pas sans conséquences pour la réflexion sur l’acte eucharistique. La recherche est menée ici avec l’aide de concepts psychanalytiques freudo-lacaniens. Le péché du premier couple est le refus radical de l’ordre symbolique mis en place par l’acte créateur de Dieu. La rencontre d’Emmaüs permet au contraire aux disciples d’accéder pleinement au champ symbolique en instituant un nouveau rapport au voir et à l’oralité qui débouche sur la reconnaissance de l’altérité. Quelques réflexions dogmatiques et éthiques terminent cette recherche.

Extraits

p. 8 : La Loi de Dieu est donc que la créature ne peut bien vivre qu’en refusant l’immédiateté. Cela est encore bien plus accentué par ce que les psychanalystes appelleraient la mise en place de l’interdit fondateur (v. 9 et vv. 16-17). Cet interdit, cela est très remarquable, porte essentiellement sur la fonction orale. On sait que cette fonction est le siège des structurations les plus archaïques de la personnalité… Autour de cette fonction, se font les premières expériences marquantes de castration et d’introjection. Il n’est pas étonnant que les tentations dans la Bible fassent allusion très souvent à des tentations d’ordre oral : celle du premier couple, sur laquelle nous allons revenir, celle du peuple de Dieu dans le désert, celle de Jésus

p. 12 : Il est certain par contre que le Serpent s’y entend pour faire tomber les évidences fragiles de tout sujet désirant : il fausse l’interdit fondateur en lui donnant des proportions que Dieu ne lui avait pas données : « Dieu vous a dit : vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin » (v. lb). C’est insinuer que Dieu, créateur du désir, est castrateur puisque ce désir ne peut plus trouver un seul objet pour s’assouvir

p. 14 : « Vos yeux s’ouvriront et vous serez comme des dieux. » C’est de nouveau la toute-puissance imaginaire des dieux qui est promise. Il s’agit de sortir de sa condition humaine pour accéder à un état surhumain, donc in-humain, de pseudo-divinisation. Jésus, Fils de Dieu, renversera cette quête inlassable de l’homme pécheur en acceptant de s’humaniser, par l’amour, jusqu’à mourir solidaire de ceux qui sont les exclus de la société (cf. Lc 4, 1-13; Ph 2, 6-11). Ce renversement sera précisément rappelé par Jésus aux disciples d’Emmaüs.

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